jeudi 24 avril 2008

Marie


Marie, 99 ans - Extraits


Je m'appelle Marie, comme ma mère et ma grand-mère. Je suis née à Châteaulin en mai 1908. Nous étions trois filles. Je suis l'aînée...


...Mes grand-parents et mes parents parlaient breton, ils ne comprenaient pas le français. Moi, je parlais breton chez moi et français à l'école...


... Mon père a fait la guerre de 14, il est allé en Serbie. Je me rappelle des femmes qui pleuraient en entendant les cloches sonner la déclaration de la guerre. Ma mère, elle, est allée travailler à la poudrerie de Pont-de-Buis...


... Mon père a participé à la construction de la ligne de chemin de fer qui allait à Crozon...


... Je suis allée à l'école des soeurs. Elles nous apprenaient à lire et à écrire. Après la classe, à l'ouvroir, on nous apprenait à coudre avec un dé mais sans fil sur l'aiguille. Il y avait la classe des riches et celle des pauvres qui ne pouvaient payer. J'étais chez les pauvres mais on apprenait la même chose...


... Quand je suis sortie de l'école, à 13-14 ans, ma grand-mère qui était couturière dans un hôtel-restaurant, m'a présentée puisqu'ils cherchaient une petite bonne... Je m'occupais des chambres... J'étais bien nourrie, il y avait une bonne cuisinière... Je suis venue à Paris dix ans plus tard. Une femme, dont la soeur habitait Châteaulin, cherchait une bonne... J'y suis restée assez longtemps. J'étais logée, nourrie, blanchie. J'avais une chambre de bonne et je travaillais tous les jours sauf le dimanche après-midi où j'allais au bal à Wagram. Si je n'étais pas rentrée à 7 heures, la patronne faisait la tête. Elle ne disait rien mais elle faisait la tête...

... J'ai connu mon mari à Châteaulin pendant la guerre... Moi, je travaillais dans les tourbières et je m'étais cassé le bras. Il y avait une machine pour faire des carrés de tourbe qu'on devait faire sécher avant de les brûler. Un jour où il manquait un homme pour mettre les pelletées de tourbe dans la machine, j'ai voulu le remplacer. Il y a eu un coup de vent, ma robe s'est prise dans la machine et j'ai eu le bras tout abîmé. Je ne pouvais plus travaillé et bien sûr, je n'était pas payée...


... Quand on m'entend parler, on ne me donne pas 99 ans. Ma langue marche bien. Mes pieds moins bien....

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